A quel saint se vouer ? (2)

Pour Fr. Paul-Bernard Hodel

Vita et Miracula S. Vincentii Ferrerii
Jean IV LECLERC (1560-1621/1622), éditeur
1612
Burin
C. de pl. : 19,3 x 12,5 cm
France, Paris, Bibliothèque du Saulchoir – cote : Rés. Mod. D111 (pièce 4).

© Claire Rousseau

 

 

 

 

La peste, dite la grande mourine, est sans aucun doute l’épidémie la plus redoutable en raison de son taux de mortalité particulièrement élevé.
La Bretagne n’en fut pas épargnée… mais à partir de 1419 et durant tout le XVe siècle, la population trouva un intercesseur de choix en la personne de saint Vincent Ferrier, enterré dans la cathédrale de Vannes. A son tombeau furent portés les malades, les offrandes et les actes de reconnaissance d’une population bouleversée et décimée.

Les biographies de saint Vincent en rendent compte, telle celle du dominicain Bernard Guyard qui égrène les témoignages : La Vie de S. Vincent Ferrier Religievx de l’Ordre des Freres Preschevrs diuisée en deux parties. La premiere fait voir ce qv’il a fait en sa vie deuant son entrée en Bretagne et la seconde les merveilles qu’il a opéré en sa vie & apres sa mort en cette Prouince. Par le R.P. Bernard Gvyard de Iesus Marie Religieux du mesme Ordre, A Paris, Chez Denis Moreav, ruë S. Iacques à l’enseigne de la Salamandre d’argent, 1634.

Ces récits restent pour l’historien d’aujourd’hui des sources complémentaires d’information à défaut d’en avoir de plus médicales :
 » La « grande mourine » n’est pas toujours décrite, si bien que l’historien est incapable de déterminer ses manifestations habituelles, buboniques, pulmonaires et septicémiques, ou même de la distinguer d’autres maladies infectieuses. Les seuls détails proviennent des témoignages de gens simples, qui ont échappé miraculeusement au fléau ou… aux médecins, et qui viennent prier sur le tombeau de Maître Vincent à Vannes. »
Jean-Pierre LEGUAY, Vivre dans les villes bretonnes au Moyen Âge, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2009 (Histoire), p. 404.

Les Vies en image de Vincent Ferrier gravées au XVIIe siècle confirment l’intercession thaumaturgique du saint et redonnent au lecteur assurance et confiance aux temps des nouvelles épidémies comme au temps de grâce :
Hic sua post mortem petÿt qui numina supplex / Sanavit dira languida membra lue / Dopò la morte sua risana un’ appestato.

A l’autre bout du pays, Marseille fut frappée une dernière fois par la peste en 1720. L’évêque, monseigneur de Belsunce, et les religieux, en particulier les jésuites et les dominicains y déployèrent une charité exemplaire.
Déjà, en 1475, les religieux de saint Dominique avaient exhorté en prêche – pour des raisons de moralité – à une mise en confinement partiel de la cité. Leurs préconisations furent suivies avec sagesse par le conseil de ville. En 1720, ils appliquèrent pour eux-mêmes des principes de précaution tout en servant la population. La vigilance élémentaire était déjà au service de la charité. La leçon est toujours valable aujourd’hui et l’histoire future en attestera les bienfaits.

Un dominicain du couvent de Marseille ayant lu ce message me précise que, durant la peste de 1720, les Frères récitèrent les litanies du Sacré Coeur composées par Anne-Madeleine Rémuzat :
« Ces Litanies, autorisées pour l’Eglise universelle et enrichies d’une indulgence de 300 jours, viennent primitivement de la Vénérable Anne-Madeleine Rémuzat qui les a composées vers 1718. Propagées par la Vénérable pendant la terrible peste de Marseille en 1720, ces Litanies ont été d’un puissant secours pour obtenir la cessation du fléau dans cette ville. »
En ce temps d’épidémie, la communauté de Marseille récite de nouveau ces litanies, chaque jour, avant le repas de midi [selon la version remaniée à la fin du XIXe siècle].

Seigneur, ayez pitié de nous!
Ô Christ, ayez pitié de nous!
Seigneur, ayez pitié de nous!

Jésus, écoutez-nous.
Jésus, exaucez-nous.

Père céleste, qui êtes Dieu, ayez pitié de nous.
Fils, Rédempteur du monde, qui êtes Dieu, ayez pitié de nous.
Esprit-Saint, qui êtes Dieu, ayez pitié de nous.
Sainte Trinité, qui êtes un seul Dieu, ayez pitié de nous.

Cœur de Jésus, Fils du Père éternel, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, formé par le Saint-Esprit dans le sein de la Vierge Mère, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, uni substantiellement au Verbe de Dieu, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, d’une infinie majesté, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, temple saint de Dieu, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, tabernacle du Très-Haut, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, maison de Dieu et porte du ciel, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, fournaise ardente de charité, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, sanctuaire de la justice et de l’amour, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, plein d’amour et de bonté, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, abîme de toutes les vertus, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, très digne de toutes louanges, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, roi et centre de tous les cœurs, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, en qui se trouvent tous les trésors de la sagesse et de la science, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, en qui réside toute la plénitude de la Divinité, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, objet des complaisances du Père, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, dont la plénitude se répand sur nous tous, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, le désiré des collines éternelles, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, patient et très miséricordieux, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, libéral pour tous ceux qui vous invoquent, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, source de vie et de sainteté, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, propitiation pour nos péchés, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, rassasié d’opprobres, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, broyé à cause de nos crimes, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, obéissant jusqu’à la mort, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, percé par la lance, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, source de toute consolation, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, notre vie et notre résurrection, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, notre paix et notre réconciliation, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, victime des pécheurs, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, salut de ceux qui espèrent en vous, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, espérance de ceux qui meurent en vous, ayez pitié de nous.
Cœur de Jésus, délices de tous les saints, ayez pitié de nous.

Agneau de Dieu, qui effacez les péchés du monde, pardonnez-nous, Seigneur.
Agneau de Dieu, qui effacez les péchés du monde, exaucez-nous, Seigneur.
Agneau de Dieu, qui effacez les péchés du monde, ayez pitié de nous, Seigneur. Jésus-Christ, écoutez-nous.

Jésus-Christ, exaucez-nous.
Jésus, doux et humble de cœur, rendez notre cœur semblable au vôtre.

Prions. Dieu tout-puissant et éternel, considérez le Cœur de votre Fils bien-aimé ainsi que les louanges et les satisfactions qu’il vous a offertes au nom des pécheurs: à ceux qui implorent votre miséricorde, accordez avec bienveillance le pardon au nom de ce même Jésus-Christ, votre Fils, notre Seigneur et notre Dieu, qui règne avec vous, dans l’unité du Saint-Esprit, pour les siècles des siècles. Ainsi-soit-il.